mardi 22 juillet 2008

Arnaud Labelle-Rojoux : le syndrome de l'acteur - chanteur.

Le problème, si problème il y a, chez ALR (mais à l’air de quoi ?...) c’est qu’il est un bien trop brillant auteur. Alors oui, comment faire pour demeurer artiste quand on est aussi doué ? Non pas qu’il soit un artiste médiocre, bien au contraire. Ces oeuvres mélangent, dans un amalgame auquel nous n’oserions même pas penser, l’érudition la plus totale (trop parfois ?) à la fulgurance d’une réalisation plus proche de l’art brut que de Van Eyck. Comme un conceptuel type Kosuth qui s’acharnerait tant bien que mal à réaliser ses oeuvres, même si on lui dit que ce n’est pas foncièrement nécessaire.... Peu importe : ALR demeure un sujet scintillant, artiste littéraire, peintre pitre.
En France, on le sait, on ne pardonne pas toujours de vouloir jouer sur tous les registres, entamer toutes les partitions avec la même désinvolture. Acteur forcément doué, chanteur sans doute pas si mauvais....
ALR, une âme de rockeur sous le béret, est un américain travesti. Il est Arnaud Ramone, l’improbable Ramones intelligent, ou une sorte de Pere Ubu digne, un David Thomas devenu rigolo. En fait, il est sans doute le King (puisqu'il n'est pas mort....), et si vous vous demandez encore pourquoi, lisez « Elvis » (Sémiose éditions).
Malgré une reconnaissance pas toujours à sa hauteur, ALR continue pourtant à nous éduquer ; il reste sans doute pour tout cela le meilleur ami de l'homme : chienne de vie !...

Le Fou Dédoublé, "Sacré Kador", 2000
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Tribute to Elvis, 2002
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Mur (défense de lever la patte !)
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dimanche 20 juillet 2008

Les musiciens artistes : des brutes de l'art.

Que faire en sortant d'une école d'art ? Une bonne question que devrait se poser pas mal de ceux qui décident un jour d'y entrer.... Devenir artiste semble être l'alternative la plus directement liée à la vocation première de l'institut susmentionné. L'autre possibilité est presque tout aussi évidente : monter un groupe de rock.
Si la proportion de musiciens passés par des écoles d'art est tout à fait impressionnante (alors que peu d'artistes continuent leur carrière musicale : Creed, Verna, Marclay -.... ? ), quelles conclusions devons-nous tirer sur leurs capacités artistiques réelles ? Force du destin, hasard de la vie, talent incroyable pour la musique ? Manque d'inspiration pour l'art ? Sûrement pas ! J'en veux pour preuve l'exposition "It's not only Rock'n'Roll, baby !" au Palais des Beaux-Arts de Bruxelles jusqu'au 14 septembre. Regroupant une liste conséquente d'invités*, l'exposition tend à démontrer les qualités artistiques de nos chers musiciens. Si la tentative est noble, le résultat est forcément inégal. Entre les crises adolescentes de Pete Doherty et les réflexions Fluxus de Yoko Ono, il y a un monde. Un monde où l'on trouve, entre autres, les installations pas inintéressantes d'Alan Vega.
Un mot sur le commissaire qui n'est autre, bien entendu, que Jérôme Sans, cas rarissime (pour le coup...) de commissaire "rockeur" (quant à sa participation au sein de Liquid Architecture.... louable tentative, crédibilité questionnée, échec musical ?).
Beulah enfin, avec son album Yoko, propose une invitation délicate à boucler la "spirale" des artistes / musiciens / artistes..... avec une pochette hommage (à peine) déguisé à l'album The Beatles, dont la couverture originale est signée... de l'artiste Richard Hamilton.

Alan Vega :
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Yoko Ono :
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Beulah :
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*Alan Vega, Antony, Bent van Looy (Das Pop), Bianca Casady (Cocorosie), Brian Eno, Chicks on Speed, David Byrne, Devendra Banhart, Fischerspooner, Jonsi Birgisson (Riceboy Sleeps), Kembra Pfahler, Kyle Field, Laurie Anderson, Miss Kittin, Nick Zinner (Yeah Yeah Yeah's), Patti Smith, Pete Doherty, The Kills, The Residents et Yoko Ono.

samedi 12 juillet 2008

Gravetemple : la menace fantôme.

...ou l'art de redonner sa place démoniaque à la batterie.
Le concert du 9 juillet au Point Ephémère de Paris débutait pourtant selon une formule devenue quasi "classique" pour une formation incluant 3 membres plus ou moins permanents de Sunn O))) : guitares minimalisantes, jeu sur la saturation, mis en exergue de l'ampli comme instrument à part entière et chant, bien que monocorde, offrant des variations sensibles. Lumière bleue à contre-jour noyée de fumée, ambiance étouffante et éprouvante, volume sonore pénétrant. Très bien, malgré un vague sentiment de déjà-vu et un Oren Ambarchi pas toujours très heureux dans ses interventions. Concernant la sensation de déjà entendu, on ne peut que rappeler que venant des mêmes, tout ceci est plutôt logique, pas de copie ici mais simple style, leur originalité finalement.
Mais on était alors sans savoir que Gravetemple Trio (Stephen O'Malley, Attila Csihar, Oren Ambarchi) cachait en son sein une arme de destruction massive : Matt "Skitz" Sanders. L'apparition sonore de la batterie dans un halo de lumière orangée évoquant irrémédiablement le feu souterrain de l'enfer bousculait alors toutes les certitudes. Rappelant les tribulations tribales à l'origine du rock et de sa réputation sulfureuse, le rythme déchirait le voile d'ignorance et laissait entrer le Mal dans le décor. Le "Satanas ex Machina" remettait en cause le groupe en tant qu'organisation, tant par l'arythmie que par la désynchronisation apparente. Le contraste du 3+1 dans le groupe redonnait alors à chaque membre une place dans un équilibre fragile mais profondément pertinent. La tension naissait paradoxalement de l'arrivée de l'élément fondateur et organe de stabilité du groupe : la batterie. Skitz, dans une violence sourde héritée du death metal, n'est pas "resté devant le temple" mais a délibérément choisi de déterrer les racines du mal, faisant basculé le concert dans un nouveau champ, remettant en question l'unité des liens unissant l'espace au temps. Un trou noir. Un temple enfoui. Une tombe.
Plus que des mots, l'éclosion de la batterie au milieu du concert faisait l'effet de voir arriver un char d'assaut dans sa rue.... Quoi de plus normal pour un groupe dont le premier concert s'est déroulé en Israël, en plein champ de bataille.
Gravetemple Trio est mort ! Vive Gravetemple !
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La Jeunesse Sonique à la galerie Vert sur Rouge.

"Sonic Youth" est en passe de devenir une expression du langage courant, désignant un acte mêlant activité musicale et artistique. C'est en tout cas ce que tend à montrer l'exposition à la Green on Red Gallery de Dublin jusqu'à fin juillet qui a choisi pour titre le nom du célèbre combo new-yorkais. 7 artistes vidéos présentent des oeuvres ayant trait aux relations ambiguës de la musique et de la création actuelle. A noter, la présence de William Hunt avec la très belle performance "Even as you see me now" ainsi que la mythique "File under sacred music" des excellents Iain Forsyth & jane Pollard. Reconstitution à l'identique du célèbre concert de The Cramps au Napa State Mental Institute de 1978. Entre le "Blow-up, stroll on" de Christoph Draeger (reconstitution du concert des Yardbirds dans Blow-Up d'Antonioni) et le "Psycho" de Gus Van Sant, on se rapproche des questions d'identité, d'auteur, de vol et de copie, en dépassant le cadre de la simple réappropriation ou citation post-moderne. Pour ces dernières, on doit plus se tourner, dans son accession pop-culturelle, vers le clip "les limites" de Julien Doré / "Chez les Yéyé" de Gainsbourg : c'est intéressant, mais c'est autre chose....
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samedi 5 juillet 2008

DJ Spooky / Jackson Pollock : Songs of a dead dreamer.

Décidemment, Dj Spooky n'est pas un d.j. comme les autres. Auteur de deux remarquables ouvrages ("Rythm Science" et "Sound Unbound") et d'une musique capable de réfléchir sur elle-même, il continue à explorer les limites du style et à expérimenter ses connexions avec l'art. Exposé au MOCA de Los Angeles en 2002 avec son "Marcel Duchamp Remix" puis invité à la prestigieuse Biennale de Venise en 2007, Paul D. Miller, that Subliminal Kid Burroughsien, tentera de transmuter son saphir en enamel le 13 septembre au Trabendo de Paris. Un "tribute to Jackson Pollock" est au programme de cette soirée forcément surprenante.
Si vous aussi vous voulez vous prendre pour un Pollock virtuel (pas virtuose), vous allez le choix entre www.jacksonpollock.org, le site qui en jette, par Miltos Manetas, ou faire confiance à Otto, le zombie le plus cool du cercle très fermé des zombies cools, virtuose (pas virtuel) de l'éclaboussure maîtrisée.
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Jackson P"otto"ck vs Jack the Dripper ?
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Surprise! You're dead!

Après le vol d'une partie des cendres de Kurt Cobain, c'est au tour de la pierre tombale de Ian Curtis d'être dérobée.... Sombre période pour les héros morts. Heureusement, la nécrophilie (phagie ?) et le retour des zombies tueurs (le maître Romero en tête) nous annoncent que notre époque n'est finalement pas si ennuyeuse, ni dépravée que cela....
Pour ceux qui demeurent fascinés par la mort et la sacralisation sous toutes ces formes, on vous encourage vivement à préférer à ces passe-temps moribonds la visite de "Traces du sacré" au Centre Pompidou, jusqu'au 11 août (notamment les salles 11, 16 et 22) ou mieux encore, à aller voir "Otto; or, up with dead people" de Bruce Labruce.
Quant aux rock stars, il leur est fortement conseillé de faire comme le premier d'entre eux, Robert Johnson : ne mettez pas votre nom sur la stèle, ça évite beaucoup de soucis... et de dérangements (vos voisins, bien qu'anonymes, n'ont pas toujours eu, eux aussi, la vie facile....).
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